Le Rebelle (The fontainhead)
de King Vidor
Année 1949
Avec Gary Cooper et Patricia Neal
Durée 114 mn
Le rebelle (The fountainhead) 1949
Mardi 7 avril 2015
King Vidor réalise avec Le Rebelle le film le plus emblématique de ses préoccupations de cinéaste. Lui qui a souvent filmé l’affrontement entre le passé et le futur, la quête de l’absolu et l’individualisme, dont il était le chantre inconditionnel (« Seule la puissance de l’expression individuelle peut continuer à justifier le cinéma » disait-il, trouve dans le roman d’Ayn Rand un sujet à même de magnifier ses thèmes… Le Rebelle est un film lyrique à la mise en scène ample, virtuose.
DVDClassik
The Fountainhead est sans aucun doute l’un des plus ambitieux et complexe film américain jamais réalisé. Pas pour son budget ou ses stars, mais pour l’idée et le discours puissant qu’il défend, l’individu contre le collectif…Le Rebelle se pose en vibrant plaidoyer à l’individualité et à l’intégrité de l’artiste avec ce personnage d’architecte farouchement attaché à ses principes quitte à mettre sa carrière en danger, sur que le temps parlera pour lui…Un film à l’influence considérable qui en plus d’offrir de Vidor la vision de son Amérique idéale, définit un type de personnage et de mise en scène à la modernité qui ne s’est jamais démentie.
Chronique du cinéphile stakhanoviste
C’est un film malin, savant, glacé, hyper pro, mais aussi un film abrupt, brutal, cinglant, convulsé, compulsif, déchiqueté, déjanté, délirant, discrépant, érotique étourdissant, fascinant, frénétique, grossier, haché, hystérique, malpoli, romantique, surréel, torride, trépidant. Un objet barbare, un météorite. S’il fallait conserver de toute la production hollywoodienne qu’un seul film, ce serait celui-ci… Le Rebelle demeure l’une des plus sublimes création du génie humain.
Luc Moullet Le Rebelle de King Vidor, Les arrêtes vives, 2009
Malgré de claires allusions anti-communistes et anti-collectivistes symptômes de l’époque … la plaidoirie de Cooper développe les principes professés et mis en œuvre tant par Vidor que par Wright. La distinction et le conflit entre « parasites » et « créateurs autonomes », les premiers étant rendus responsables de tous les actes barbares dans l’histoire de l’humanité, les seconds étant exaltés comme des bâtisseurs solitaires qui travaillent « pour soi », constituent la force motrice et dynamique qui fait progresser l’humanité. L’Artiste est « le législateur inconnu du monde » disait Wright.
Lorenzo Codelli, L’intégrité infinie de l’artiste individuel Positif #163, Novembre. 1974
King Vidor (1894- 1982))
Films principaux : The Big Parade (La Grande Parade) 1925,The Crowd (La Foule) 1928, Billy the Kid (1930), Our Daily Bread (Notre Pain Quotidien) 1934, North West Passage (Le Grand Passage) 1940, Duel in the Sun (Duel au Soleil) 1947, War and Peace ‘Guerre et Paix) 1956.
Tout autant qu’Américain, King Vidor est Texan. Un poète texan…Son cinéma avec ses ambitions épiques, son appréhension cosmique du monde, des rapports entre l’Individu, la Nature, la Création, l’excès des sentiments semble être né de ces paysages infinis, de ces ciels immenses, de cette terre déchirée par les contradictions : entre l’agriculture et l’industrie, toutes deux démesurées, l’attachement au passé et le besoin de conquérir le futur …Dès ses débuts , Vidor s’opposa à l’axiome qui reste l’un des fondements de Hollywood : « Si vous voulez envoyer un message, utilisez Western Union. » Comme Griffith il voulut tourner des œuvres signifiantes, filmer des idées, traiter de problèmes de civilisation, « mais sans cette sophistication européenne dont j’étais dépourvu » comme il le déclare avec une désarmante ingénuité.
Bertrand Tavernier, 50 ans de Cinéma Américain
Toute son œuvre c’est la geste de l’homme libre qui dévore les grands espaces, prend à bras le corps une terre, donne la main à son voisin, regarde ses ennemis en face, bâtit des villes, fonde un pays… Vidor s’est voulu le chantre de l’Amérique pour autant que l’Amérique idéale, celle des pionniers est le lieu de l’épanouissement individuel ; le poète aussi de l’action, de la volonté de vaincre et du dépassement de soi.
Jean Wagner
… le cinéaste n’a jamais reculé devant les excès inhérents aux sujets et aux genres qu’il abordait… Son tempérament messianique, ses curiosités métaphysiques, … son gout immodéré des symboles … l’ont poussé à porter à leur point d’incandescence les passions brassées par ses récits.
Plus soucieuse d’expressivité que de vraisemblance, sa dramaturgie s’est toujours nourrie de situations conflictuelles, de contrastes tranchés et exemplaires, … Et c’est encore au mélodrame que la thématique vidorienne emprunta le plus souvent sa dynamique, à savoir un mouvement pendulaire entre deux pôles antagonistes … qui figurent les postulations contraires du cœur humain .
Michael Henry Wilson, A la porte du paradis, Armand Colin, 2014